Budget Communication 1998 – Cinémas, multiplexes
Question orale à Mme Trautmann Ministre de la Culture et de la communication
M. Patrick Bloche.
Ma question porte sur le problème de la distribution du cinéma indépendant. Mais, auparavant, je voudrais vous rendre hommage pour deux actions. D’abord, pour les choix budgétaires que vous avez opérés, puisque vous consacrez 20 millions de francs environ au soutien de la distribution indépendante, et 15 millions à l’aide à la rénovation des salles gérées Par des distributeurs indépendants dans les zones d’influence des multiplex. Ensuite, pour avoir répondu avec célérité au mois de juin, alors que vous veniez d’être nommée ministre, à la demande que nous avions été plusieurs à formuler et visant à ce qu’un recours soit déposé devant la commission nationale d’équipement cinématographique à propos de l’implantation d’un multiplex de quatorze salles à Aquaboulevard.
Une solution a été trouvée et ce multiplex est autorisé après qu’un certain nombre de garanties eurent été apportées, notamment par la société Gaumont. Mais la procédure qui a été mise en place, en application de la loi du 5 juillet 1996, ne m’apparaît pas satisfaisante, s’agissant notamment de la composition des commissions nationale ou départementales d’équipement cinématographique.
Pour prendre le département que je connais le mieux, à savoir celui de Paris, la composition de la commission départementale comprend, sept membres: le maire de Paris ou son représentant, le maire de l’arrondissement du lieu d’implantation, un conseiller d’arrondissement désigné par le conseil de Paris, le président de la chambre de commerce, le président de la chambre des métiers, un membre du comité consultatif de la diffusion cinématographique et un représentant des associations de consommateurs du département. Or cette composition ne m’apparaît pas satisfaisante, notamment parce que les distributeurs indépendants ne sont pas représentés. Madame le ministre, envisagez-vous de réformer la loi du 5 juillet 1996 ?
M. Jean-Pierre Baeumler. – Très bien!
M. le président. – La parole est à Mme le ministre.
Mme le ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le député, je sais que vous êtes intéressé par cette question et l’épisode que vous avez rappelé a été l’une des premières expériences de ministre le premier week-end qui a suivi l’installation du Gouvernement.
Pour les multiplex, on peut dire que le constat est rude. Le système actuel ne fonctionne pas bien. Parfois, on ne tranche pas entre les différents projets et ceux-ci peuvent se multiplier sur des zones extrêmement rapprochées. Cela pose deux problèmes : celui de la viabilité de ces structures et celui de le leur programmation, car, si elles ont du mal à assurer une certaine rentabilité, elles seront tentées par une programmation plus commerciale. Outre les conséquences que cette démarche entraînera pour les films d’auteurs qui en subiront le contrecoup, il faut aussi envisager une incidence sur la tarification. La concurrence risque alors de devenir une lutte qui pourrait à son tour, par effet de ricochet, jouer sur la qualité des programmations et des services offerts à la population Cela étant, les multiplex recèlent quelques possibilités nouvelles, et il convient d’aborder cette question sans polémique et en toute lucidité. L’ouverture de. multiplexes permet aussi de faire venir vers les salles de cinéma. Personnellement, j’estime qu’ils doivent être considérés comme des équipements culturels à part entière.
Il faut donc les voir non pas comme des distributeurs de films, qui s’apparenteraient à des grandes surfaces de distribution, mais comme des équipements culturels qui ‘intègrent dans un territoire donné, avec un certain nombre de conséquences dans le paysage culturel du réseau des institutions, et des effets de proximité entre tissus urbain et rural.
Voilà pourquoi j’ai souhaité avancer dans deux directions. La première vise à donner la possibilité aux élus d’être éclairés dans les choix qu’ils peuvent faire lorsqu’ils s’engagent dans un projet de multiplex. Dans ce but, nous apportons la touche finale à un guide des élus que j’avais annoncé en commission des affaires culturelles lors de ma première audition. La seconde tend à refondre de la loi, car nous ne disposons pas aujourd’hui des moyens de travailler correctement et de décider.
Je peux, quant à moi, procéder par recours. je l’ai déjà fait et je le ferai vraisemblablement encore dans certains cas. Cette procédure permet sans doute d’élaborer une certaine jurisprudence, mais cela ne me paraît pas particulièrement judicieux. Mieux vaut, en effet, prévenir plutôt que tenter de guérir par une procédure qui risque d’amener des révisions de choix pas très compréhensibles ni par les élus ni par les entreprises qui veulent s’investir.
Parallèlement, monsieur le député, les actions en faveur des salles indépendantes sont renforcées par l’augmentation du soutien sélectif aux salles, particulièrement dans les centres-villes où dans les zones d’influence des multiplex, car il faut le faire dans les deux cas.
Nous procédons également à la réforme de l’aide aux salles indépendantes d’édition à Paris et dans les grandes villes. L’objectif de cette procédure renouvelée est d’encourager les salles qui se consacrent à une programmation difficile en leur apportant une aide économiquement justifiée qui est susceptible de maintenir ou d’élargir leur clientèle (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)