Budget de la culture pour 2000

Deux questions à la ministre. Séance du 5 novembre 1999 (résumé)


(1ère question) : M. Patrick Bloche

– A mon tour, je salue votre effort budgétaire et aussi la judicieuse répartition des crédits, en particulier du spectacle vivant, à hauteur de 80 millions, et de la danse.
La démocratisation culturelle n’est pas une entreprise aisée. Les enquêtes le montrent, les pratiques culturelles des Français ne changent guère. Ceux qui ont l’habitude d’aller au spectacle ou au musée continuent de le faire, sans que les publics s’élargissent réellement. Je salue les mesures tarifaires annoncées, en particulier l’extension de la gratuité dans les musées, ou la place à 50 F le jeudi soir dans cinq théâtres nationaux.
Cependant, je constate comme élu parisien que la politique tarifaire menée par la ville a pour résultat principal que ceux qui vont régulièrement au cinéma, au théâtre ou au concert y vont simplement un peu plus, mais guère les autres.
Quelles mesures d’accompagnement de votre politique tarifaire envisagez-vous ?

Mme la Ministre – Vous avez raison, une politique de démocratisation ne saurait se borner à des mesures tarifaires. C’est très tôt, à l’école, qu’il faut procurer le bagage, la curiosité et le goût d’accéder aux oeuvres d’art. C’est pourquoi l’enseignement artistique à l’école est pour nous une priorité.
Je souhaite développer aussi pour les jeunes un système de carte culture, permettant d’accéder pour une somme modique à tous les éléments du patrimoine national. Dans un pays républicain, où l’enseignement est gratuit, l’accès à la culture doit être lui aussi le moins coûteux possible.
Nous travaillons dans ce sens avec les collectivités locales, y compris pour favoriser l’accès aux festivals d’été, avec l’aide de la SNCF.
La démocratisation se heurte à l’obstacle du revenu et à la distance sociale. C’est pourquoi nous demandons aux institutions, dans la charte des missions de service public, d’aller à la rencontre des populations exclues du domaine de la culture. Il faut travailler dans les quartiers, en zone rurale, en évitant l’excès de sectorisation.
Les pratiques amateurs offrent aussi un moyen efficace d’accéder à la culture.

(Deuxième question) : M. Patrick Bloche

– Je salue également votre rôle international au service de la diversité culturelle et du pluralisme linguistique.
Comment amplifier la dimension internationale de l’action de votre ministère ? Je m’interroge aussi comme rapporteur du budget des relations culturelles internationales, qui dépend du ministère des affaires étrangères.
Au plan administratif, comptez-vous renforcer votre département des affaires internationales ? L’Association française d’action artistique s’est profondément réformée sous l’action de son nouveau directeur Olivier Poivre-d’Arvor. Elle se consacre à des opérations d’ingénierie culturelle. Le ministère de la culture devrait y être davantage présent, pour établir une véritable synergie avec le Quai d’Orsay.
L’action culturelle internationale passe aussi par tout ce que représente Paris, face à la concurrence de Londres, Berlin, Milan ou Barcelone. Je ne conteste pas la nécessité de rééquilibrer les crédits avec la province, mais l’Etat doit continuer de remplir dans la capitale son rôle historique de soutien aux grands équipements culturels, puisque la municipalité ne remplit pas ses obligations.

Mme la Ministre – Je souhaite renforcer notre action au niveau international et européen. Nous allons nous impliquer davantage dans la construction communautaire avec le plan Culture 2000, le nouveau programme Médias, le soutien à la création multimédias. Je mesure bien la nécessité d’une action collective lorsque mes collègues nous demandent des expertises dans le domaine des bibliothèques, ou pour la constitution du fonds de soutien à la création cinématographique. Nous disposons d’un DAI, que je souhaite placer auprès de la direction générale pour qu’il coordonne efficacement l’action des différentes directions, en mettant à leur disposition ses compétences juridiques et sa connaissance de la réglementation communautaire et internationale. Nos interlocuteurs ont été fort étonnés de voir que, chez nous, le Premier ministre, le ministre de l’économie et de finances, celui du commerce extérieur et celui de la culture étaient désormais « sur la même longueur d’onde » ! De fait, nous avons mis au point une position commune à propos de l’AMI mais il faut que nous abordions les négociations de l’OMC en rangs encore plus serrés. C’est pourquoi nous nous emploierons, en nous appuyant sur l’AFAA qui est en effet experte en ingénierie culturelle, à mieux coordonner l’action du Quai d’Orsay et celle de mon ministère. Déjà, pour ne prendre qu’un exemple, j’ai décidé de recourir davantage à nos conseillers « audiovisuel » des ambassades de manière à être présents dans l’ensemble du monde, et j’ai demandé à Unifrance d’élaborer une stratégie internationale de sorte qu’artistes, professionnels de la culture et partenaires publics interviennent partout dans le même sens, en liaison avec les pays les plus proches de nos positions. Par ailleurs, nous ne négligerons ni les ressources de la coopération transfrontalière ni celles de la coopération décentralisée.
Nous progressons mais nous pouvons encore faire mieux. M Védrine et moi-même en avons la volonté, convaincus que nous sommes de la nécessité d’additionner nos budgets et nos efforts pour pouvoir réagir les premiers aux bouleversements de la société de l’information décrits dans votre rapport (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)