Négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l’emploi

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.


M. Patrick Bloche. En complément des propos de nos collègues Maxime Gremetz et Catherine Génisson, comment ne pas regretter que soient remises en cause à la sauvette des dispositions promulguées au tout début de l’année, avant même que leur application soit évaluée ?


Il est extrêmement choquant, au demeurant, que ces amendements soient présentés par des parlementaires qui, dans l’hémicycle, mettent en avant leur qualité professionnelle de chef d’entreprise, donnant à leur démarche un côté « revanche sociale » que nous avons déjà dénoncé en d’autres occasions.
M. Jean-Michel Fourgous. Ça vous va bien de dire ça ! La LMS, c’était uniquement de la revanche sociale !


M. Patrick Bloche. Nous prenons acte du fait que M. le rapporteur et M. le ministre n’ont fort heureusement pas retenu l’amendement 106, qui remet en cause la définition du harcèlement moral, mais comment ne pas regretter qu’ils n’adoptent pas la même position pour l’amendement n° 39, qui revient sur un équilibre trouvé en séance, Catherine Génisson le rappelait, dans le droit-fil de la jurisprudence de la Cour de cassation ?


Sans remettre en cause la charge de la preuve, il est présenté comme un rééquilibrage. Mais ce rééquilibrage est-il justifié ? Nous vivons fort heureusement en République et l’article L. 122-52 rappelle que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction utiles. Le salarié victime d’un harcèlement moral bénéficie de toutes les dispositions du droit civil et du droit pénal pour le prouver.


Dans ce domaine ô combien sensible, sur lequel nous sommes souvent interpellés dans nos permanences parlementaires, nous avions fait il y a un an oeuvre d’équilibre dans l’écriture de la loi. Je regrette que cet équilibre soit aussi rapidement rompu.

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 46
Nombre de suffrages exprimés 46
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 36
Contre 10

L’Assemblée nationale a adopté.


Avant d’appeler l’amendement n° 195, je vous informe que, sur cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste d’une demande de scrutin public.


Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.


MM. Morange, Juillot, Tian, Hamelin, Anciaux, Bernier, Colombier, Couanau, Cugnenc, Depierre, Fagnier, Mmes Lévy, Gallez, Marland-Militello et M. Dubernard ont présenté un amendement, n° 195, ainsi libellé :
« Après l’article 3, insérer l’article suivant :
« I. – Le premier alinéa de l’article L. 122-54 du code du travail est ainsi rédigé :
« Une procédure de médiation peut être engagée par toute personne de l’entreprise s’estimant victime de harcèlement moral ou sexuel. Elle peut être également mise en oeuvre par la personne mise en cause. Le choix du médiateur fait l’objet d’un accord entre les parties. »
« II. – Les deuxième, troisième et sixième alinéas du même article sont supprimés. »

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.


M. Patrick Bloche.
J’attire l’attention de l’Assemblée sur la façon dont nous légiférons. S’il ne s’agissait effectivement que de rapprocher les parties pour éviter une procédure judiciaire, nous pourrions vous suivre, mais Catherine Génisson vient de démontrer très clairement que l’amendement visait à supprimer toute possibilité de faire appel à un médiateur en dehors de l’entreprise. J’ajoute qu’en écrivant sans nuance que « le choix du médiateur fait l’objet d’un accord entre les parties », les auteurs de l’amendement prennent le risque d’aboutir au résultat inverse de celui qu’ils souhaitent car, faute d’accord, tout le monde se retrouvera directement chez le juge !

Quant à la suppression de l’obligation de discrétion faite au médiateur sur la santé des personnes concernées, elle nous semble totalement incompréhensible, mais je n’y reviendrai pas pour ne pas abuser de mon temps de parole. Cet amendement devrait être réécrit d’ici à la deuxième lecture car il va à l’encontre du but qu’il est censé viser. Le mieux serait donc qu’il soit retiré.