Budget de la Ville de Paris et du Département pour 2005

Intervention de Patrick BLOCHE,
Président du Groupe socialiste
et radical de gauche

Monsieur le Maire,
Mes cher(e)s Collègues,

Le budget que vous nous présentez aujourd’hui, Monsieur le Maire, s’inscrit avec détermination dans la poursuite des objectifs prioritaires fixés en 2001: faire de Paris la Capitale de la solidarité et améliorer sensiblement les conditions de vie quotidienne des Parisiennes et des Parisiens. Et ceci malgré les embûches semées sur notre route par un gouvernement qui, depuis deux ans, décentralise avec cynisme les déficits qu’il a lui-même créés.

Cette année encore, dans notre ville, les moyens en direction de la solidarité sont renforcés : ce sont 1,3 milliards d’euros qui y sont consacrés, soit le quart de la totalité des dépenses.

Dans un contexte économique et social sur lequel les choix gouvernementaux pèsent tant et qui génère toujours plus de précarité et de pauvreté, les départements assument désormais pleinement une responsabilité primordiale pour la cohésion sociale : allouer le RMI. Cette mission s’accomplit malheureusement dans les plus mauvaises conditions qui soient, l’Etat ne jouant pas franc-jeu quant aux compensations que la loi lui impose pourtant de verser. De fait, la hausse sensible du nombre des allocataires depuis la date de la réforme (soit décembre 2003) conduira logiquement à ce que le surcoût de 30 Millions d’euros de 2004 soit significativement dépassé l’année prochaine.

Verser des allocations, c’est naturellement essentiel pour ceux qui les reçoivent et en ont tant besoin, c’est néanmoins insuffisant. Nous voulons des politiques qui luttent contre la fatalité de l’exclusion, qui offrent un maximum de portes de sortie de l’assistance. Nous ne pouvons donc que nous féliciter que les moyens dédiés à l’insertion professionnelle augmentent de 21%. Avec des actions ciblées, comme le lancement dans les 18ème et 19ème arrondissements, du Plan Local pour l’Insertion et l’Emploi de Paris qui devrait contribuer à 1.500 retours à l’emploi.

La politique de Paris pour lutter contre le chômage est ambitieuse, dynamique et appréciée de nos concitoyens, comme en témoigne le succès des deux éditions du Forum Paris pour l’emploi. Nous félicitons, à cet égard, Christian SAUTTER d’avoir mis en œuvre cette manifestation innovante, qui se démultiplie désormais dans plusieurs arrondissements sous différentes formes. Nous saluons également la promotion du secteur de l’économie solidaire, avec la création de 4 nouvelles régies de quartier en 2005 et la participation de la Ville à la future création de 300 emplois-tremplins. La municipalité souhaite, en effet, s’engager aux côtés de la Région Ile-de-France dans cette initiative qui nous paraît essentielle, puisqu’elle répondra doublement aux besoins de notre économie : développer les emplois dans les secteurs d’utilité sociale et cibler les publics les plus fragiles face au marché du travail.

Tout aussi utile à l’emploi dans notre ville et à l’image internationale de Paris, la valorisation de la recherche et de l’innovation par le développement des pôles de compétitivité, est très présente dans ce budget, et nous nous en réjouissons.

La préoccupation de justice sociale est également ce qui a motivé la réforme des aides facultatives du Centre d’Action Sociale, dont nous débattrons demain. Mais ce n’est pas simplement par des mesures financières que l’on promeut l’égalité, c’est aussi en donnant corps aux valeurs d’intégration et de lutte contre les discriminations. A cette fin, nous notons tout particulièrement les mesures destinées à améliorer la vie des 200 000 Parisiens souffrant d’un handicap par l’amélioration de l’accessibilité aux transports et aux équipements publics, mais aussi par le développement de l’offre sportive pour les jeunes handicapés.

Préparer un budget, c’est aussi savoir prévoir sur le long terme, c’est poser les bases d’un avenir meilleur. Voilà pourquoi nous sommes si attentifs aux préoccupations des jeunes ménages parisiens. Paris doit rester une ville où chacun puisse s’installer, y trouver un travail et – selon ses choix de vie – élever des enfants. La flambée des prix de l’immobilier a repoussé hors les frontières de la capitale plusieurs centaines de milliers de familles. Nous voulons que cette hémorragie s’arrête, et plus encore inverser la tendance. Car, c’est une nécessité pour conserver à notre ville son dynamisme et sa mixité sociale.

Ce sont tout d’abord les mesures en faveur de l’accès au logement, tandis que demeure une complète incertitude sur la politique du gouvernement en la matière, après ses effets d’annonces. Nous nous réjouissons ainsi, Monsieur le Maire, de votre objectif ambitieux de passer de 3.500 à 4.000 logements sociaux financés chaque année. Autre mesure volontaire, le  » Prêt Paris Logement 0%  » qui ouvre aux ménages à revenus moyens un accès à la propriété, sera doté en 2005 de 8 millions d’euros.

J’ai souhaité d’ailleurs accompagner cet effort prioritaire de notre municipalité en faisant voter, lors de la première lecture du budget de l’Etat à l’Assemblée Nationale, le 19 novembre dernier, un amendement visant à limiter par l’utilisation de l’arme fiscale les ventes à la découpe si désastreuses pour nombre de locataires parisiens.

La Ville doit aussi offrir aux parents les moyens d’élever leurs enfants dans les meilleures conditions qui soient. C’est d’abord leur ouvrir l’accès aux modes de garde de leur choix. C’est l’objectif des 60 millions d’euros consacrés aux nouveaux équipements pour la petite enfance ; en 2005, ils permettront l’ouverture de 900 places en crèche.

Investir dans l’école, c’est donner aux plus jeunes des Parisiens un cadre favorable à leur épanouissement personnel et à leur vie en collectivité. Les structures scolaires font ainsi partie des priorités en matière d’investissement : 2 nouvelles écoles seront ouvertes en 2005, ainsi qu’un collège ; de nombreux programmes de rénovation seront engagés ou poursuivis. Ces structures doivent être pleinement adaptées aux exigences de la scolarité d’aujourd’hui, c’est le sens des 4 Millions d’euros inscrits pour l’acquisition de matériel informatique.

Nous trouvons par ailleurs dans ce budget tous les moyens d’améliorer la qualité de vie à Paris, en matière de propreté, de sécurité, d’environnement avec les crédits consacrés aux espaces verts, par exemple.

L’année 2005 sera à nouveau une grande année pour les investissements en matière de transports collectifs, puisque ceux-ci vont augmenter de 63% par rapport à 2004. Certains des grands chantiers lancés dès le début de la mandature, commencent à prendre forme : tramway, programme Mobilien, pistes cyclables, quartiers verts.

Les choix importants que nous ferons, l’année prochaine, en matière d’urbanisme préfigureront les quartiers parisiens du 21ème siècle. Aussi, sommes-nous heureux du dynamisme de cette politique, qui permet progressivement de rattraper le retard accumulé sous les précédentes mandatures : c’est notamment l’augmentation de 12,5% du compte foncier pour acquérir de nouveaux terrains nécessaires aux grandes opérations d’aménagement ou pour créer de nouveaux équipements publics.

Vous connaissez également, Monsieur le Maire, l’attachement de notre groupe à la politique culturelle et vous pouvez deviner notre satisfaction que l’engagement du contrat de mandature de doublement du budget de la culture (hors dépense de personnel) soit en bonne voie. Afin d’avoir un suivi au plus près des moyens alloués, il est plus que jamais utile aux élus de disposer régulièrement d’un récapitulatif global et analytique des subventions qui ont été attribuées depuis le début de la mandature. Afin d’accroître en 2005 la capacité de la municipalité à soutenir financièrement un plus grand nombre de projets culturels dans les arrondissements, notre groupe a souhaité déposer un amendement visant à augmenter de 250.000 euros le montant des subventions culturelles. Mais, nous souhaitons aller plus loin dans l’amélioration du système d’attribution de ces subventions, par la voie de la déconcentration. Nous rappelons notre proposition d’offrir au personnel de la Direction des Affaires Culturelles les moyens d’être au plus près des attentes locales, en étant présent de façon permanente dans les mairies d’arrondissement, pour travailler en synergie avec les élus responsables de ces questions. Il y aurait ainsi des interlocuteurs référents culture de la Mairie centrale dans les arrondissements, comme il y a des offices du mouvement sportif dans un secteur qui, de façon analogue, fonctionne largement sous forme de subventions. Cette organisation permettrait une meilleure appréciation des besoins et une meilleure évaluation de l’utilisation de l’argent public, en bref une meilleure efficacité au service de l’objectif qui est le nôtre : conquérir de nouveaux publics et élargir l’accès à la culture.

Nous sommes tous conscients du contexte difficile dans lequel a été élaboré ce budget, avec des recettes externes qui ne progressent que très modérément. C’est notamment la conséquence des choix gouvernementaux de ne pas accroître les bases d’imposition ou de réformer, par exemple, la taxe professionnelle de France Telecom, ce qui occasionnera, en 2005 encore, pour notre ville, une perte de recettes inacceptable de 10 millions d’euros.

Les dotations de l’Etat représentent aujourd’hui plus du quart des recettes de fonctionnement, part qui devrait s’accroître avec les réformes fiscales annoncées, avec le risque qu’elles se fassent au détriment de l’autonomie des collectivités. A cet égard, il est révélateur que ce soit la mobilisation du Parlement qui ait forcé le gouvernement à accroître la dotation forfaitaire de 1%, et non de 0% comme il en avait l’intention. Mais, on est là avec une dotation a minima, inférieure même à l’inflation.

La faiblesse des recettes externes est heureusement compensée par une bonne gestion des dépenses et la recherche de recettes internes, grâce notamment à la poursuite de la cession de biens inutiles aux Parisiens.

Nous sommes entrés, depuis 2004, dans la mise en œuvre du Programme Pluriannuel d’Investissement, et en 2005 encore, les crédits de paiement vont augmenter de façon significative : avec 1,370 milliards d’euros, c’est 34% de plus qu’au budget primitif 2004 et presque deux fois plus que l’encours moyen d’investissement sous la précédente mandature. Vous souhaitez, Monsieur le Maire, pouvoir emprunter dans une limite de 1 milliard d’euros, et c’est avec confiance que nous vous soutenons : d’une part parce que vous avez fait la preuve de votre volonté de gérer la dette de façon efficace, mais aussi parce qu’il s’agit ici d’investir pour l’avenir.

Je veux néanmoins terminer sur une note d’inquiétude, face aux incertitudes que la défaillance organisée de l’actuel gouvernement fait peser sur la réalisation de nos objectifs prioritaires. Comment envisager ainsi l’effectivité d’une loi de cohésion sociale si l’on en décharge l’application sur des collectivités aux moyens contraints ? Quel crédit accorder à ces bonnes intentions exprimées face à une réduction de 20% des crédits nationaux consacrés à la politique de la ville en 2005 et face à une diminution par deux des subventions accordées aux associations œuvrant localement en ce domaine ?

Pire encore, nous savons aujourd’hui – vous l’avez rappelé Monsieur le Maire – que l’Etat ne tient pas ses engagements : 110 millions de dettes à l’égard des bailleurs sociaux, alors que le logement est présenté comme une priorité nationale. C’est par ailleurs un retrait de nombre d’engagements pourtant inscrits dans les contrats de plan.
C’est la raison pour laquelle notre groupe a souhaité déposer un vœu visant à dénoncer globalement le désengagement de l’Etat que vous avez vous-même, Monsieur le Maire, chiffré à plusieurs dizaines de millions d’euros pour notre ville.
Mais que ces inquiétudes, bien que fondées, ne ternissent pas le soutien que nous vous apportons et l’enthousiasme que nous aurons à voter ce budget, ambitieux, exigeant, et tourné plus que jamais vers l’avenir.