Plan local d’Urbanisme (PLU)
Intervention de Patrick BLOCHE,
Président du Groupe socialiste
et radical de gauche
Monsieur le Maire,
Cher(e)s Collègues,
Nous devons aujourd’hui nous prononcer avant le lancement de l’enquête publique sur le Plan local d’Urbanisme, qui permettra de dessiner, pour les vingt années à venir, le nouveau visage de notre capitale.
Fixer les règles d’urbanisme pour deux décennies représente un véritable défi : il s’agit, en effet, de concilier l’impératif de développement économique et de l’habitat avec l’amélioration du cadre de vie de nos concitoyens, tout en tenant compte de la densité du bâti (l’une des plus importantes au monde au regard de la petite superficie de notre ville : 105 km²), paramètre déterminant dans l’élaboration de la nouvelle carte urbaine.
Pour répondre à ce défi, vous avez choisi, Monsieur le Maire, la voie la plus féconde pour la vie démocratique de notre Cité. Fidèle à vos engagements, vous avez voulu élaborer le PLU en y associant, par une politique inédite de concertation, l’ensemble des Parisiennes et des Parisiens.
Le PLU est, d’abord en cela, un acte démocratique fondateur pour Paris.
Un acte fondateur, car la démarche collective et constructive qui a présidé à l’élaboration du PLU, grâce à l’énergie et la compétence de votre adjoint à l’urbanisme, Jean-Pierre Caffet, et de son équipe, auquel je tiens à rendre un hommage tout particulier au nom des élus socialistes et radicaux de gauche, nous a véritablement permis de rompre avec l’immobilisme parisien existant par le passé en matière d’urbanisme.
L’ancien Plan d’Occupation des Sols, auquel doit se substituer le PLU, datait de 1977. Il n’avait été modifié que partiellement depuis, révélant le manque d’ambition de la droite parisienne et sa frilosité à l’égard des grands projets d’aménagement urbain.
Afin de changer cette vision étriquée de la Ville, vous avez saisi dès 2001, Monsieur le Maire, la formidable opportunité offerte par la Loi SRU de décembre 2000, pour lancer l’un des chantiers les plus ambitieux de la mandature.
D’abord par l’élaboration concertée du Projet d’aménagement et de développement durable, voté il y a exactement deux ans par l’ensemble de la majorité municipale.
Ensuite, par l’envoi d’un questionnaire à 800.000 foyers parisiens, questionnaire dont le taux de réponse (+ de 15%), a démontré un réel intérêt citoyen pour les questions d’architecture et d’aménagement urbain. Les débats qui ont eu lieu, ensuite, sur le projet des Halles – qui constitue l’un des 21 secteurs d’aménagement définis dans le cadre du PADD -, en ont été une autre illustration.
Dans les échanges passionnants, souvent passionnés, qui ont jalonné le processus d’élaboration du PLU, c’est quelque part la Ville rêvée qui est dessinée, celle d’une Cité où l’on voudrait pouvoir concilier l’art de vivre la ville, celui de se loger et d’y travailler.
Le PLU est un acte démocratique au sens où le règlement qui nous est présenté apporte des réponses concrètes aux attentes de nos concitoyens. Il convient tout particulièrement de saluer le remarquable travail accompli par les associations locales et les 121 Conseils de quartiers – plus de 11.000 propositions ont ainsi été faites – mais aussi par les maires et les élus d’arrondissements.
Des limitations conséquentes à la densité des constructions sont donc apportées, une place plus grande est accordée aux espaces verts, les filets de hauteur existants sont préservés, répondant à la demande des Parisiens, hormis les plus jeunes, de ne pas construire d’immeubles de grande hauteur supplémentaires. Il s’agit de vivre mieux à Paris en faisant respirer la Ville, en permettant à ses habitants de se la réapproprier et de réinvestir l’espace public. Cela passe, bien sûr, par la réduction de la circulation automobile pour des enjeux de santé publique, par le développement des transports en commun en sites propres, sans pour autant que cela se fasse au détriment du stationnement. C’est d’ailleurs là l’un des principaux enseignements du questionnaire déjà cité dont notre groupe a souhaité se faire l’écho en demandant que soit étudiée la possibilité d’un zonage spécifique en matière de stationnement résidentiel.
Pour autant, nous pensons, Monsieur le Maire, qu’il est important de veiller à ce que l’on ne puisse utiliser cette « arme réglementaire » que peut être le PLU, pour figer la ville. Nous ne ferions alors que reproduire les erreurs du passé. Il convient d’être attentif à éviter tout risque de glaciation du bâti qui pourrait finalement s’avérer contraire à l’objectif d’évolution du paysage urbain. Or, celle-ci est primordiale si l’on souhaite répondre au désir de pouvoir vivre et travailler à Paris. Ainsi, nombre de ménages ne trouvent plus à se loger à Paris dans des conditions satisfaisantes, alors même qu’ils y travaillent.
Vous n’avez pas attendu l’élaboration du PLU, Monsieur le Maire, pour répondre à cette attente. Vous vous êtes déjà engagé à créer d’abord 3.500 puis, à partir de 2005, 4.000 logements sociaux par an jusqu’à la fin de la mandature, l’objectif de 4.000 logements ayant d’ailleurs été atteint à la fin de l’année dernière par Jean-Yves Mano.
Les élus socialistes et radicaux de gauche souhaitent, à cet égard, que les éventuelles modifications qui seront apportées au PLU, notamment dans le cadre de l’enquête publique, continuent de répondre pleinement à l’objectif de relance de la production de logements, notamment sociaux et intermédiaires.
Le PLU est fondamentalement un acte démocratique dans la mesure où il édicte des règles stables, mais non figées, dont l’application, dans un cadre concerté, permet une meilleure prise en compte des besoins et des attentes au niveau local.
Pour notre groupe, il est également un moyen de réaffirmer notre vision politique de la ville qui ne peut être que celle de toute la majorité municipale car il inscrit durablement, dans le nouveau règlement d’urbanisme, les priorités de la mandature.
Le PLU contient, en cela, des innovations essentielles.
Il affirme, tout d’abord la conception d’une Ville à partager, car l’égoïsme va mal à Paris. Cela passe par la traduction réglementaire de l’impératif de mixité sociale sur les territoires non construits. Le PLU comporte, à cette fin, des dispositions nouvelles qui vont au-delà de l’obligation légale prévue par la loi SRU. L’inégalité d’implantation des ensembles de logements sociaux, déficitaire dans l’Ouest parisien, a conduit à mettre en place un dispositif correcteur inédit qui touchera l’ensemble des constructeurs : c’est l’obligation de construire au moins 25% de logements sociaux dans chaque programme de logements. Il s’agit également d’utiliser des matériaux de qualité allant dans le sens du développement durable, de privilégier la démarche HQE en la mettant au service des habitants de la Cité. C’est dans cet esprit que les élus socialistes et radicaux de gauche proposent de déduire du calcul de la surface habitable nette certaines surfaces communes, comme les loggias, les halls d’entrée, les locaux à vélos et à poussettes…, afin de développer des logements de plus grande qualité pour le plus grand nombre.
Toujours avec cet objectif de ville à partager, il s’agit aussi de veiller au maintien sur le territoire parisien des classes moyennes dont Monsieur Goasguen vient visiblement de redécouvrir l’existence, et des familles, en luttant notamment contre la disparition du parc intermédiaire et social de fait.
Comment ne pas pointer ici les conséquences brutales et désastreuses de la vente à la découpe que les députés socialistes ont été les premiers à vouloir encadrer. Il revient principalement au gouvernement de mettre en œuvre un dispositif législatif et réglementaire contraignant et, en attendant qu’il produise ses effets, face à la menace qui pèse sur la mixité sociale de nombre de nos quartiers, d’instaurer un moratoire de six mois, comme vous l’avez vous-même demandé, Monsieur le Maire.
De façon complémentaire, dans le cadre municipal, notre groupe propose d’ailleurs qu’une partie de ces logements puisse être maintenue en parc locatif à des niveaux de loyers situés entre 20% et 30% des prix du marché. Nous souhaitons également augmenter, par des partenariats exigeants avec les promoteurs, le parc locatif intermédiaire, afin de développer le parcours résidentiel, élément essentiel de la politique du logement menée depuis le début de la mandature.
Le PLU est, de manière essentielle, le reflet d’une ville à développer.
De manière générale, il permet de sortir d’une logique – celle des municipalités précédentes largement défavorable à l’emploi et aux petites entreprises commerciales et artisanales, où les bureaux étaient à l’Ouest et les logements à l’Est. Le PLU permet ainsi d’inscrire sur la carte urbaine quelques 200 territoires de projets et s’attache à promouvoir une vision plus équilibrée, pour ne pas dire équitable du territoire parisien.
Si la qualité de la vie est naturellement une priorité de l’action municipale, Paris doit aussi être une ville dynamique qui favorise la création d’emplois ; elle doit susciter l’envie, pour les entreprises, de s’y installer et, pour les petits commerces, d’y rester. Cela passe par l’implantation d’activités économiques dans l’Est parisien et le maintien partout des services de proximité. C’est tout l’enjeu que représente, par exemple, le projet d’aménagement de Paris Nord-Est, mais aussi celui de Paris Rive Gauche avec le regroupement par pôle de compétence, comme les nouvelles technologies ou la création.
Un territoire plus équilibré, une carte urbaine plus lisible, tels sont à notre sens des apports majeurs du PLU pour l’avenir de Paris.
D’autres projets d’aménagement, comme celui du secteur des Batignolles dans la perspective des Jeux Olympiques de 2012, seront également déterminants. La candidature à l’accueil de Jeux populaires, solidaires, écologiques et éthiques, est, en effet, un élément à part entière du projet pour Paris.
Enfin, le PLU permet de réinventer la ville, c’est-à-dire de la renouveler dans ses formes et dans son habitat, sans ignorer toutes les sédimentations architecturales qui fondent son identité et toute sa poésie urbaine.
Le développement de Paris passe, à ce titre, par un projet qui soit respectueux de la diversité de son patrimoine architectural. Je tiens ici à souligner les efforts faits par la municipalité, et notamment par Sandrine Mazetier, pour inscrire Paris dans une vision moderne et dynamique du patrimoine. Celle-ci faisait jusque-là cruellement défaut. Avec les nouvelles normes de protection du patrimoine mises en place, l’architecture industrielle, faubourienne et contemporaine, les ateliers d’artistes, certains lieux culturels emblématiques voient maintenant leur place pleinement reconnue.
Réinventer la ville c’est aussi l’ouvrir chaque jour davantage, sur son environnement extérieur. Par l’aménagement de grands sites culturels comme le 104 rue d’Aubervilliers, la Gaîté lyrique ou la Maison des Métallos.
Mais c’est aussi projeter son regard hors les murs, franchir les barrières culturelles qui sont parfois tout simplement des frontières urbaines, comme celle du périphérique.
A cet égard, le PLU permet véritablement de casser l’isolement de notre ville. Cet objectif est ainsi au centre des 11 Grands Projets de Renouvellement Urbain concernant l’aménagement des portes de Paris. Les projets de la Porte de Vincennes et de la Porte Pouchet sont ainsi emblématiques de la politique de coopération intercommunale menée depuis 2001. Ils portent des ambitions fortes en matière de restructuration urbaine, de reconquête économique et sociale et de continuité géographique avec les communes limitrophes.
Le PLU est certes un règlement pour notre ville mais il s’ancre dans une perspective plus large, celle de l’agglomération parisienne. A cet égard, il convient bien de réaffirmer que Paris n’appartient pas aux seuls habitants de ses vingt arrondissements mais à tous les Franciliens. Les projets d’aménagement de Paris et de la région Ile-de-France ne peuvent s’ignorer, ils se doivent d’être pensés dans leurs complémentarités respectives.
Comment ne pas constater, pour conclure, que le PLU redonne tout son sens et sa noblesse au mot politique, à son étymologie grecque, c’est-à-dire ce qui est relatif à la polis, à la cité. Nous considérons à cet égard que l’afflux d’inscriptions nouvelles sur les listes électorales traduit l’intérêt croissant des Parisiens pour les grands choix publics qui les concernent.
Monsieur le Maire, mes chers Collègues, Paris est une ville qui vibre et nous voulons, avec ce PLU, vibrer avec elle.