Visant le transfert des cendres d’Alfred Dreyfus au Panthéon

Voeu de Patrick BLOCHE, Lyne COHEN-SOLAL
et des élus des groupe socialiste et radical de gauche.

 

Né à Mulhouse en 1859, Alfred Dreyfus veut œuvrer à la reconquête de l’Alsace-Lorraine et choisit la carrière militaire. Après un court séjour au collège Sainte-Barbe, il entre comme interne au collège. Il intègre l’école Polytechnique. En janvier 1893, il entre comme stagiaire à l’état-major général de l’Armée.

Une lettre (« bordereau ») trouvée à l’ambassade d’Allemagne révèle qu’un espion se cache parmi les officiers de l’état-major français. Le capitaine Alfred Dreyfus est suspecté. On lui reproche d’être juif et d’être un officier « moderniste ». Son arrestation, le 15 octobre 1894, puis son procès devant le conseil de guerre montrent l’effondrement des principes démocratiques. Jugé coupable du crime de haute trahison, il est condamné à la dégradation et à la déportation. Les gouvernants et les parlementaires sont impuissants à résister aux assauts de l’opinion publique et à l’argument de la raison d’État.

Sa dégradation a lieu, le 5 janvier 1895, dans la cour d’honneur de l’École militaire, devant une foule abondante qui crie sa haine des juifs.. Déporté à l’île du Diable, le capitaine Dreyfus lutte pour sa réhabilitation et adresse en vain des missives aux autorités de la République. Mais l’administration lui refuse les moyens de préparer sa défense. Le 9 juin 1899, Dreyfus quitte l’île du Diable.

Dès 1895, les premiers dreyfusards se rassemblent. Le grand rabbin Zadoc Kahn, l’écrivain Bernard Lazare, l’homme politique Joseph Reinach luttent pour les droits de l’accusé à un jugement équitable. Ils sont rejoints par l’historien Gabriel Monod, puis par Émile Zola. Bernard Lazare rédige une brochure démontrant l’innocence d’Alfred Dreyfus, une erreur judiciaire. L’affaire Dreyfus devient une affaire politique. Après un court procès, Esterhazy est acquitté le 11 janvier 1898. Indigné, Zola adresse une lettre ouverte au président de la République, publiée sous le titre « J’accuse… ! » le 13 janvier 1898, dans L’Aurore, le journal de Clemenceau. Cette lettre lui vaut un procès, une condamnation et l’exil. En août 1898, le colonel Henry reconnaît avoir fabriqué un faux et se suicide. Esterhazy s’enfuit à Londres et le gouvernement est discrédité. Les preuves de la machination contre Dreyfus s’accumulent. Le combat pour la révision du procès Dreyfus devient le combat pour la justice dans la République. Mais, le 3 juin 1899, les magistrats cassent le verdict de 1894 et convoquent Alfred Dreyfus devant un conseil de guerre à Rennes.

Le verdict prononcé par la cour militaire, le 9 septembre – dix ans de réclusion et une seconde dégradation. Alfred Dreyfus, en mauvaise santé, ne peut supporter une longue détention. Mathieu Dreyfus obtient la grâce présidentielle pour son frère, le 19 septembre. Désormais libre, Alfred Dreyfus, décidé à faire réparer l’erreur judiciaire dont il est la victime, déclare : « Le gouvernement de la République me rend la liberté. Elle n’est rien pour moi sans l’honneur ».
La mort brutale de Zola en septembre 1902, et l’engagement de Jaurès, lors d’un grand discours à la Chambre en avril 1903, aboutissent à l’ouverture d’une enquête. La découverte de nouvelles machinations décide le gouvernement d’Émile Combes à saisir la Cour de cassation. Le 12 juillet 1906, un arrêt de la Cour de cassation réhabilite Alfred Dreyfus. Soucieux de sa dignité, Alfred Dreyfus décide alors de démissionner. Officier de réserve, il reviendra sous les drapeaux durant la guerre de 1914-1918 et meurt le 12 juillet 1935.

Cette « affaire » a marqué profondément la France et surtout la République naissante. Elle participe du fondement de nos valeurs, en particulier, celles de la laïcité de l’Etat et du refus des discriminations. En cela l’Affaire Dreyfus est remarquable. Le transport des cendres d’Alfred Dreyfus au Panthéon permettrait de célébrer l’héroïsme du citoyen ordinaire, du résistant et surtout des droits des citoyens qui fondent notre justice et qui ont porté l’arrêt solennel de la Cour de cassation, il y a juste cent ans.

Aussi, sur proposition de Lyne Cohen-Solal, Patrick Bloche et des membres du groupe socialiste et radical de gauche, le Conseil de Paris émet le vœu que :

Le maire de Paris demande au Président de la République que les cendres d’Alfred Dreyfus soient transférées au Panthéon.