Action extérieure de l’Etat – Rayonnement culturel et scientifique

(Rapport pour avis n°3341 tome 1 – Commission des Affaires culturelles)

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers Collègues,


s’agissant des crédits du programme « Rayonnement culturel et scientifique » je me bornerai à vous faire part des préoccupations dont j’ai été saisi de la part de ceux qui contribuent au quotidien au rayonnement de la culture française dans le monde. Quelques exemples concrets suffiront à montrer le décalage entre les moyens alloués et les ambitions affichées.

Mon attention a tout d’abord été attirée sur la situation difficile de l’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger, l’AEFE, au risque de contrarier notre rapporteur spécial ; j’espère qu’il ne m’en voudra pas trop !

Apparemment, la situation financière de cet établissement s’améliore puisque ses crédits augmenteront de 8 millions par rapport à la loi de finances initiale pour 2006. En réalité, la situation de l’AEFE est beaucoup plus préoccupante et ce sont les familles qui supportent l’essentiel du coût du désengagement de l’État.

Rappelons qu’en 2006 les crédits publics affectés à l’AEFE ont diminué, passant de 325 millions d’euros en 2005 à 323 millions d’euros en 2006, tandis que les dépenses de cet établissement public sont en constante augmentation. Cette situation est d’autant plus préoccupante que l’AEFE a subi de plein fouet la régulation budgétaire. Je voudrais savoir si les 16 millions d’euros qui ont été gelés par le ministère du budget sur la subvention 2006 de l’AEFE pourront faire l’objet d’une décision de dégel.

De plus, l’AEFE a reçu des compétences directes sur son parc immobilier et aucune dotation n’est prévue à ce titre ; il faudra donc prélever les crédits nécessaires sur son fonds de roulement.
Je voudrais ici relayer les propos de M. Michel Laurencin, président de la Fédération des professeurs de français résidant à l’étranger, qui montre l’intérêt d’établir une comparaison entre le coût, pour l’État, de la scolarisation d’un élève français en France et de la scolarisation d’un élève français à l’étranger, y compris les bourses scolaires.

Le constat est instructif : en moyenne, la scolarisation d’un élève français de l’AEFE représente pour l’État environ 41% du coût généré par une scolarisation en France. Dans ces conditions, que doit-on penser des engagements souscrits depuis plusieurs années déjà par deux présidents de la République successifs – vous voyez que je ne suis pas sectaire – tendant à établir l’égalité entre les Français de France et les Français à l’étranger ?

En 1990, lors de la création de l’AEFE, la part de l’État dans le financement de cet établissement public était de 60% ; elle ne représente plus que 40% aujourd’hui. Le financement est donc assuré très majoritairement par les parents d’élèves, à hauteur de 60%. On constate une augmentation progressive de la participation des familles aux dépenses de rémunération des personnels résidents, qui compense la faible évolution de la participation de l’État : entre 1990 et 2000, la participation financière de l’État a augmenté de 67% tandis que celle des parents d’élèves a progressé de 190% ! Pourriez-vous, monsieur le ministre, préciser les moyens dont dispose l’AEFE pour entretenir son patrimoine immobilier et moderniser ses établissements ? Il semblerait que des projets existent pour chercher des financements privés afin d’assurer certains travaux immobiliers : qu’en est-il exactement ?
Je voudrais maintenant aborder la question de la politique de coopération culturelle, scientifique et technique.

Après une baisse de l’ordre de 8% dans la loi de finances pour 2006, les crédits destinés au soutien des échanges scientifiques, techniques et universitaires sont reconduits à hauteur de 43,48 millions d’euros. Ces crédits poursuivent trois objectifs : renforcer l’attractivité du territoire auprès des étudiants et des chercheurs étrangers, promouvoir la science française à l’étranger et contribuer à la gouvernance et aux échanges techniques.

L’évolution de la politique de coopération culturelle, scientifique et technique est très préoccupante. Le nombre de coopérants civils est passé de 23.000 en 1980 à 9.100 en 1990 et 1.300 en 2005. À qui fera-t-on croire qu’une mission de courte durée, sur une année seulement, est de nature à sécuriser de véritables programmes d’assistanat technique ?

La limitation de la durée du contrat, alors que la durée moyenne d’exécution des projets est supérieure, conduit au départ d’assistants techniques en cours de projet, ce qui suscite l’incompréhension des autorités locales et la frustration des intéressés. La baisse des effectifs d’assistants est perçue à l’étranger comme un déclin de la place et de l’aide de la France.

La situation des établissements culturels n’incite pas non plus à l’optimisme quant au dynamisme de la présence française à l’étranger. Sous couvert de rationaliser le réseau culturel, il n’en demeure pas moins que dix-neuf centres culturels ont été fermés entre 2000 et 2006 et que ce mouvement va se poursuivre, l’objectif étant par ailleurs d’obtenir un taux d’autofinancement des établissements de 60% d’ici à 2010 contre 51,1% actuellement. J’aimerais savoir comment les établissements culturels pourront atteindre cet objectif d’autofinancement : un effort sera-t-il fait pour rechercher du mécénat ou s’agit-il d’augmenter la participation financière des élèves qui suivent des cours de français ?

J’en viens à la création de la nouvelle agence culturelle « Cultures France ». Issue de la fusion, le 22 juin dernier, de l’Association française d’action artistique – l’AFAA – et de l’Association pour la diffusion de la pensée française – l’ADPF -, Cultures France a reçu pour mission de valoriser l’action culturelle française à l’étranger ; de promouvoir les coopérations en faveur de la diversité culturelle par le biais d’actions de formation dans le secteur de l’ingénierie culturelle et d’échanges entre artistes ; enfin, de contribuer à l’émergence d’une Europe de la culture.

Pouvez-vous nous indiquer comment votre ministère et le ministère de la culture vont coopérer pour gérer cette nouvelle agence ?

Alors que le ministère des affaires étrangères a annoncé de manière très médiatique un plan de renforcement de l’attractivité internationale de la France en mai dernier, il semble que l’accueil des étudiants étrangers en France soit toujours problématique. Ce plan prévoit la création de « Campus France », qui devrait prochainement regrouper Édufrance, Égide et les centres pour les études en France. La mise en place de cette nouvelle structure vise à simplifier la présentation de l’offre universitaire, culturelle et scientifique française et à attirer les étudiants étrangers dits « prometteurs ». Pouvez-vous nous en dire plus, monsieur le ministre, sur la date de création de ce nouvel opérateur ? En quoi l’accueil des étudiants étrangers en France s’en trouvera-t-il amélioré ?

Je voudrais vous dire très solennellement combien nous sommes interpellés quand, en tant que parlementaires, nous voyageons à l’étranger. Nos interlocuteurs étrangers soulignent régulièrement les contradictions de la politique menée par la France pour renforcer l’attractivité des universités française à l’étranger. En fait, de multiples signaux sont envoyés aux jeunes étrangers pour les dissuader de venir s’instruire en France.