Plan de Déplacements de Paris
Monsieur le Maire,
Mes Chers Collègues,
Disons-le d’emblée, c’est avec enthousiasme et détermination que le groupe socialiste et radical de gauche soutiendra le projet de délibération que vous soumettez aujourd’hui à l’approbation de notre assemblée.
Enthousiasme, car il s’agit d’inscrire Paris dans la modernité et de répondre à la forte demande de mobilité qui caractérise aujourd’hui l’espace urbain. Cette extraordinaire mobilité est incontestablement un atout pour notre ville, pour son dynamisme économique, pour son rayonnement culturel. Elle est aussi un droit, pour les personnes âgées, pour les personnes à mobilité réduite, pour l’ensemble des Parisiens et des Franciliens qui souhaitent se déplacer, en bus, en vélo, en métro, en tramway, à pied, en voiture même, et ce, pour quelque motif que ce soit.
Détermination, car il s’agit de relever un défi de santé publique. Les conséquences de la pollution sur l’équilibre du climat ou sur la santé sont connues et vous en avez, Monsieur le Maire, rappelé l’extrême gravité. Loin d’être neutres, elles affectent en premier lieu les plus démunis et les plus faibles de nos concitoyens. Paris, ville de toutes les solidarités, ne peut s’y résigner. Alors, à l’heure où les effets dévastateurs du réchauffement climatique se font cruellement ressentir, à l’heure où le Président de la République lui-même constate que nous atteignons « le seuil de l’irréversible », il est plus que temps de reconsidérer notre rapport à la ville et de tracer de nouvelles voies.
C’est tout le sens du projet que vous nous proposez, Monsieur le Maire, que de conjuguer ces exigences. Avec l’adoption du PLU et du plan bruit, avec l’élaboration en cours du Plan Climat et de l’Agenda 21 local, vous faites le choix d’engager Paris dans la voie du développement durable, dans une démarche où dynamisme économique, progrès social et préoccupations environnementales sont placés au cœur de l’action publique. Car le développement durable, ce n’est pas uniquement « réparer » ou appréhender les exigences environnementales comme un frein. Ce n’est pas moins produire, ce n’est pas moins consommer, ce n’est pas moins se déplacer. C’est au contraire établir un cercle vertueux entre ces trois « piliers ». On le voit bien, la question est éminemment politique. Alors, je ne sais, même si j’ai ma petite idée, si le développement durable est de gauche ou de droite. Certains voudraient faire croire qu’il n’est ni l’un ni l’autre. Pourtant, force est de constater qu’en ce domaine, le bilan de la droite à la tête de l’Etat depuis cinq ans est édifiant : plan climat sans mesures contraignantes, diminution de 48% du budget dédié aux transports collectifs, réduction des crédits du ministère chargé de l’environnement, aucune perspective pour les énergies renouvelables, etc. Et force est de constater, à l’inverse, que depuis la décentralisation du STIF, les investissements pour renforcer l’offre de transports en commun en Ile-de-France s’accroissent considérablement, et la Ville de Paris y prend d’ailleurs toute sa part en y contribuant à hauteur de 30% du budget.
La droite parisienne, elle, semble bien éloignée de ces considérations. Naturellement, elle prétendra le contraire, mais nous y sommes habitués : avec l’UMP, il faut savoir lire entre les lignes. Car aujourd’hui encore, elle nous joue sa sempiternelle partition : d’accord sur le fond, pas sur la forme ; d’accord sur les objectifs, pas sur la méthode ; d’accord pour réduire la circulation automobile, pas pour mettre en place les aménagements nécessaires au développement de l’offre de transports de surface. Que l’opposition s’oppose, rien de plus normal. Qu’elle boycotte à tout va – l’inauguration du tramway, la Conférence métropolitaine – cela la regarde après tout. Qu’en revanche elle use de contrevérités pour désinformer sciemment les Parisiens, ça, ce n’est pas acceptable !
L’action de la municipalité, nous dit-elle, nuirait gravement au dynamisme économique de la capitale. Désinformation : de nombreuses études le montrent, Paris est l’une des villes les plus attractives au monde pour les entreprises.
Paris serait devenue, une ville sclérosée, suffoquant sous le poids des embouteillages. Désinformation : l’étude récente d’Airparif montre que l’action initiée depuis 2001 a permis une diminution de la pollution de proximité de 6 %. Il nous est alors rétorqué que ces résultats auraient pu être plus satisfaisants encore si l’on s’en était remis au seul progrès technique. Là encore, désinformation : si les véhicules les plus récents polluent moins (dioxyde d’azote), ils émettent en revanche davantage de gaz à effets de serre (poids plus important, climatisation) contribuant ainsi au réchauffement du climat.
L’action de la municipalité serait dirigée contre ses voisins, le tramway – cette « connerie noire », cette « muraille » entre Paris et les communes qui l’entourent, je cite l’opposition municipale… – en étant la manifestation la plus symptomatique. A nouveau, désinformation : le tramway profite pleinement, tout le monde le sait, à l’ensemble des usagers franciliens qui viennent ou passent par Paris. Et c’est occulter l’action de la Ville au sein du STIF où elle prône un renforcement des liaisons banlieue/banlieue et où chaque année sa contribution ne cesse d’augmenter.
Enfin, vous auriez scandaleusement attendu six ans, Monsieur le Maire, pour élaborer ce PDP. Désinformation : Madame de Panafieu devrait savoir, puisqu’elle est parlementaire, que c’est une loi d’août 2004 qui a enfin offert à Paris la possibilité d’élaborer un tel plan.
Toutes ces approximations masquent mal une absence totale de projet. Que souhaite l’UMP pour Paris au juste ? Qu’allez-vous proposer aux Parisiens, chers collègues de l’opposition ? Leur vanterez-vous vos talents de bâtisseurs en leur disant qu’il faut « détruire » – les mots sont de Claude Goasguen – ou « casser » – ceux-ci sont de Françoise de Panafieu – certains aménagements comme ceux réalisés sur les boulevards Sébastopol ou du Montparnasse ? Leur direz-vous qu’il convient de ne rien faire d’autre que d’attendre et s’en remettre aux évolutions technologiques pour que, je cite encore les propos de Françoise de Panafieu, il y ait « moins de voitures, mieux de voitures » ? Madame de Panafieu, je vous l’ai déjà demandé, mais permettez moi d’insister à nouveau, « moins de discours, mieux de discours » éclairerait probablement notre assemblée sur ce qu’est réellement votre projet. Ah si ! Depuis peu, nous connaissons votre mesure phare : haro sur les transports de surface ! Tout sur le métro ! Avec une ouverture 24h/24 et 7j/7. Autrement dit tout pour Paris – cette mesure coûterait 1 milliard d’euros par an – là où la priorité est le développement des transports de banlieue à banlieue. Il est clair que le STIF ne pourrait assumer une telle clé de répartition. Et puis, quelle méconnaissance des besoins des Franciliens ! Alors que l’extrême diversité des motifs de déplacements implique de repenser totalement l’architecture des transports collectifs, en misant sur leur diversité, vous nous proposez d’en revenir au modèle traditionnel « métro-boulot-dodo ».
Loin de cette vision archaïque, le projet que vous nous soumettez, Monsieur le Maire, envisage au contraire une diversification de l’offre de transports, prenant ainsi en compte les besoins de tous. Il s’agit là d’un plan équilibré, aux objectifs ambitieux et aux mesures pragmatiques. Les élus socialistes et radicaux de gauche tiennent d’ailleurs à saluer votre investissement personnel qui a permis d’aboutir à un texte évitant certains écueils d’une version rendue publique il y a quelques mois et qui, de part sa nature provisoire, a été mal comprise ou ne rendait pas fidèlement compte de votre ambition pour Paris. Aussi, sommes-nous attachés à cette stratégie progressive et cohérente qui prévoit que l’ensemble des actions soient articulées dans le temps et dans l’espace.
Articulées dans le temps d’abord, avec le principe clairement affirmé de lier toute nouvelle réduction de la place de la voiture à un renforcement des transports en commun. Contrairement à ce que certains voudraient laisser penser, il n’est pas dans notre intention de déclarer une quelconque guerre aux automobilistes. Oui, l’automobile est la principale source de pollution à Paris et il convient d’en réduire la circulation. Et oui, cette diminution doit s’accompagner d’une amélioration de l’offre de transports collectifs. Cela est d’ailleurs en parfaite adéquation avec le souci des Parisiens, exprimé notamment lors du questionnaire sur le PDP, de moins utiliser leur voiture à condition de bénéficier d’une offre de transports alternative.
Une articulation dans l’espace ensuite en faisant sortir Paris de ses limites administratives. Il est vrai que la loi ne permettait pas de définir un plan de déplacements à l’échelle de l’agglomération, ce qui aurait été pourtant plus conforme à la réalité. Mais, fidèle à votre volonté de renouer le dialogue avec nos voisins, vous avez su, Monsieur le Maire, surmonter cette difficulté en associant largement à l’élaboration de ce texte la Région ainsi que l’ensemble des communes et des départements riverains. Je tiens d’ailleurs à saluer le travail effectué par vos adjoints, Denis Baupin et Pierre Mansat, qui, de réunions de concertation en réunions publiques, ont largement contribué à faire de ce texte un projet partagé, renforçant les solidarités territoriales. Mais cette association ne s’arrête pas à la seule élaboration du PDP. Elle est dans son contenu même. Alors, que l’opposition lise le projet de délibération avant de s’indigner d’un manque de concertation ! Elle se rendra alors compte que son objet n’est pas tant de fixer des mesures définitives que de tracer des perspectives qui, naturellement, feront l’objet de discussions ultérieures. C’est le cas, par exemple, pour tout ce qui concerne les axes de circulation structurants comme le boulevard périphérique, les pénétrantes dans Paris ou encore les voies sur berge, qui feront l’objet d’une décision coordonnée avec nos voisins.
Mes chers collègues, je voudrais terminer mon propos en évoquant des thèmes majeurs sur lesquels notre groupe a souhaité s’inscrire dans une démarche constructive.
Tout d’abord, la question du stationnement résidentiel. Si la réduction de la circulation automobile est un objectif que nous partageons, en revanche, il en est un que nous ne partageons pas, c’est celui d’empêcher les parisiens de posséder une voiture. Là n’est pas notre responsabilité. Aussi, l’action de la Ville ne vise pas tant à dissuader les résidents de disposer d’une voiture que de permettre à ceux qui souhaitent l’utiliser occasionnellement de la garer facilement et à un coût avantageux. C’est pourquoi, avec Claude Dargent, nous sommes à l’initiative d’un amendement visant à ce que, dans les quartiers déficitaires en stationnement, la Ville s’efforce de compenser, au sein de ces mêmes quartiers, la disparition de places qu’engendrent les différents aménagements de voirie. Par ailleurs, Sandrine Mazetier et moi-même, souhaitons que soit étudiée, une piste innovante à savoir la possibilité d’encourager l’acquisition de véhicules propres par une modulation de la part parking de la taxe d’habitation.
Autre enjeu majeur, la question du centre de Paris. Nous tenions à ce que l’élaboration du plan de circulation des quartiers centraux soit un préalable à l’aménagement de zones 30 ou de voies à priorité piétonne. Mais nous tenons aussi à ce que les mairies d’arrondissement périphériques y soient associées afin que l’ensemble du territoire parisien ne subisse pas des reports de trafic dommageables. C’est là aussi le sens de l’un de nos amendements porté par tous les maires d’arrondissement membres de notre groupe.
Enfin, nous avons souhaité, par un vœu déposé avec Lyne Cohen-Solal et Geneviève Bellenger, répondre encore plus au souci des Parisiens de se réapproprier les voies sur berge. Parce que la reconquête progressive de ces voies, en lien avec le développement d’une offre de déplacement alternative, exige l’adhésion du plus grand nombre, il nous faut engager une réflexion sur les potentialités qu’offre cet espace afin qu’il puisse être utilisé à des fins novatrices.
Ce serait là, je crois, une belle occasion de montrer aux Parisiennes et aux Parisiens, l’esprit qui a prévalu pour l’élaboration du PDP : la construction d’une ville ouverte, harmonieuse et dynamique. Nul doute, Monsieur le Maire, que cette démarche engagée depuis cinq ans emporte l’adhésion du plus grand nombre. Et puis qui sait, les élus du groupe UMP approuveront-ils peut-être ce PDP, puisque, selon sa présidente, vous ne cessez, Monsieur le Maire, de piller la plupart de ses propositions. En tout cas, pour ce qui est du groupe socialiste et radical de gauche, soyez assuré de notre soutien sans faille.