Projet de loi de finances pour 2011 – Culture
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues, l’avantage d’un débat budgétaire est que la vérité des chiffres finit toujours par s’imposer. Nos échanges présentent du moins cette vertu pédagogique.
Je trouve sinon incompréhensible, du moins curieuse la pratique consistant, pour le ministre de la culture et de la communication, à présenter une conférence de presse budgétaire tous les mois de septembre rue de Valois. Vous n’avez pas échappé, monsieur Mitterrand, à cette tradition qui veut que, chaque année, quels que soient les chiffres, le ministre de la culture et de la communication se réjouit invariablement de la hausse des crédits qui lui sont alloués.
On est pour cela amené à modifier les maquettes de présentation budgétaire : une année on joue sur les autorisations d’engagement, l’année suivante sur les crédits de paiement.
Bref, on jongle, mais le ministre satisfait réunit la presse et lui annonce que les crédits de son département augmentent. Donc, en septembre 2010, vous avez annoncé triomphalement, monsieur le ministre, une hausse de votre budget de 2 %.
Le problème est que vous avez suscité un espoir et qu’à cet espoir succédera immanquablement la déception.
Lors de votre conférence de presse, vous avez vendu, si j’ose dire, une augmentation de 2 % de votre budget alors que la hausse des crédits de la mission « Culture » n’est que de 1 %. De surcroît, si l’on met de côté les 40 millions d’euros de fonds de concours, opportunément comptabilisés cette année alors que les 50 millions de l’année dernière ne l’avaient pas été, nous parvenons à 0 % d’augmentation – si bien qu’avec un taux annuel prévu d’inflation de 1,5 %, le budget de la culture, en fait, baisse.
Si l’on considère, de surcroît, la programmation pluriannuelle des finances publiques pour les années 2011-2014, on pérennise, d’une certaine manière, la stagnation des crédits. Certes, votre budget, monsieur le ministre, est touché cette année comme le reste du budget de l’État, mais on constate malheureusement que, les années précédentes – et votre responsabilité n’est pas directement mise en cause –, le budget de la culture a été touché plus tôt et plus fortement que bien d’autres.
Ainsi, vous vous réjouissez que les crédits du patrimoine augmentent. Le Président de la République avait annoncé un plan de 4 milliards d’euros sur dix ans, à savoir 400 millions d’euros par an et nous constatons qu’après les 100 millions d’euros supplémentaires des années 2009 et 2010, on retombe cette année à 365 millions d’euros.
De la même manière, pour le spectacle vivant, les subventions aux labels et aux équipes de création baissent, alors que les acteurs du secteur nous interpellent régulièrement, comme lors de la réforme des collectivités territoriales. Ils savent bien que les subventions de l’État ne sont pas distribuées, que les DRAC, dont les crédits baissent de 16 millions d’euros encore cette année, ne participent plus aux tables rondes qui rassemblaient précédemment l’État et les collectivités territoriales.
Si vous ajoutez à cela la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques, qui revient à paupériser votre administration et qui a des conséquences sur les capacités artistiques des structures culturelles, vous mesurez combien le secteur du spectacle vivant est sinistré.
En ce qui concerne l’éducation culturelle et artistique, nous en sommes réduits au même constat : une baisse des crédits ; et quand bien même vous allez nous répondre que c’est essentiellement le ministère de l’éducation nationale qui gère ce secteur, force est d’admettre que les dispositifs partenariaux entre votre ministère et celui de la rue de Grenelle, à savoir les classes à projet artistique et culturel ou les ateliers artistiques, sont progressivement abandonnés.
Les activités favorisant la démocratisation culturelle – le travail destiné aux publics spécifiques, les pratiques amateur, les nouvelles pratiques culturelles… – sont également affectées par une baisse des crédits.
Alors que vous voulez nous vendre, monsieur le ministre, la « culture pour chacun », vous bradez à nos yeux l’héritage de Jean Zay et de Léo Lagrange, c’est-à-dire l’héritage de l’éducation populaire, de l’éducation pour tous et par tous.
Nous constatons une totale contradiction entre votre objectif de « culture pour chacun » et l’évolution des crédits de l’action culturelle.
Vous êtes le ministre des belles-lettres et des beaux-arts. Vous savez qu’à un moment de l’histoire de la peinture on avait un goût prononcé pour les trompe-l’œil. Or, en votre qualité de ministre des beaux-arts, vous nous présentez un budget en trompe-l’œil ; c’est la raison pour laquelle le groupe SRC ne le votera pas.