Contribution de la Ville au budget de la Préfecture de Police
Monsieur le Maire,
Monsieur le Préfet de Police,
Monsieur l’Adjoint au Maire, que je tiens tout particulièrement à saluer aujourd’hui,
Mes chers collègues,
La sécurité et la tranquillité publique sont des éléments fondamentaux pour la cohésion de notre ville et, plus largement, de notre société. Sans sécurité, ni tranquillité, une ville ne saurait envisager sereinement son développement. Sans sécurité, ni tranquillité, ce sont particulièrement la cohésion sociale mais aussi la liberté de chacun qui se trouvent menacés, très souvent au détriment des plus faibles et des plus modestes.
La répartition, à Paris, des compétences en matière de police municipale invite notre municipalité à travailler en bonne intelligence et en coopération avec la Préfecture de Police afin que soient respectées, dans l’intérêt de tous, les règles qui garantissent notre vivre ensemble.
Je connais parfaitement, comme beaucoup d’élus parisiens qui suivent de près ces questions, la mobilisation des fonctionnaires de police sur le terrain. Ils mènent un travail à la fois exigeant et risqué. Le métier de fonctionnaire de police n’a rien d’une mission facile. Vouloir s’engager pour l’intérêt général, en acceptant de risquer sa vie, est un acte digne qui doit être considéré à sa juste valeur. Aussi tenais-je à saluer, Monsieur le Préfet de Police, l’engagement de vos services qui, sous votre autorité et celle notamment des commissaires dans les arrondissements, agissent, chaque jour, avec courage, implication et compétence, au service des Parisiens.
Je tenais également à saluer les processus de coopération auxquels la Préfecture de Police participent : actions de communication et de prévention dans les établissements scolaires, réunions régulières entre les Maires et les Commissaires, cellules de veille, conseils locaux de sécurité et de la prévention de la délinquance ou bien encore comités de pilotage associant l’ensemble des acteurs d’un territoire, à l’instar du comité mis en place suite à l’augmentation sensible, à Belleville, des violences perpétrées à l’encontre des membres de la communauté chinoise. Ces dispositifs opérationnels sont essentiels pour partager diagnostics et solutions et permettre aux Mairies et aux commissariats d’agir dans un même sens.
Je voulais enfin saluer l’action de la Brigade des Sapeurs Pompiers de Paris et le courage physique des femmes et des hommes qui en font partie et qui, chaque jour, viennent au secours des Parisiens.
Notre groupe est attaché à cet impératif de sécurité et de tranquillité publique. Ce choix résolu est un choix pleinement assumé ; il se traduit par un effort financier conséquent de la collectivité parisienne qui contribue – d’ailleurs toujours de manière croissante – au budget de la Préfecture de Police.
Or, force est de constater que cette contribution croissante ne permet pas de réduire les craintes des Parisiens qu’alimente la situation actuelle.
Paris, depuis quelques mois, est marqué par une recrudescence de la délinquance que vous venez de détailler, Monsieur le Préfet de Police, et par une augmentation des violences faites aux personnes. Cette situation locale est, de notre point de vue, la conséquence immédiate des décisions néfastes prises par le gouvernement qui ont visé à réduire, dans le cadre de la Révision Générale des Politiques Publiques, le nombre de fonctionnaires de police mais également à supprimer la police de proximité. Une police qui présentait l’avantage primordial d’établir un lien de confiance entre les fonctionnaires de police et la population.
Je veux le dire très simplement : la présence des fonctionnaires de police dans la rue, leur connaissance d’un secteur, des habitants et des commerçants, leur attachement à un quartier doivent être des fondamentaux de l’action policière.
Il ne fait aucun doute qu’en matière de sécurité, seule la présence des effectifs policiers sur le terrain apporte des résultats concluants et continus dans le temps. Depuis septembre 2009 et la création de la police de l’agglomération parisienne, la sécurité des habitants de Paris et des trois départements de la petite couronne a été placée sous votre autorité, Monsieur le Préfet de Police. La volonté de construire un « Grand Paris de la sécurité » est une bonne chose car elle élimine des frontières, notamment géographiques, entre les services ; des frontières que la délinquance et la criminalité, elles, ne connaissent pas.
Toutefois, cette construction aurait pu se faire différemment et plus efficacement en évitant notamment qu’un rééquilibrage des moyens humains se fasse au détriment de Paris.
Cette répartition défavorable est manifeste dans certains quartiers de la Capitale où la présence policière devrait, au contraire, être renforcée. Ainsi, dans le 11e arrondissement, les cinq aires d’intervention ont été réduites à quatre avec le rapprochement, en décembre 2009, des aires « Merlin » et « Houdin ». Cette décision n’a pas été neutre en termes d’effectifs puisqu’elle a conduit à ce que sur des aires, dès lors plus étendues, un même nombre de policiers que précédemment soit affecté. In fine, cette réorganisation s’est traduite par une baisse des effectifs au niveau de l’arrondissement et par des fonctionnaires de police encore plus sollicités dans leur aire d’intervention respective. Cette décision est d’autant plus regrettable qu’elle a impacté le quartier Fontaine au Roi, quartier classé en politique de la ville, au cœur du secteur de Belleville qui est le plus dense de Paris. Sous la contrainte de la réduction des effectifs, des décisions sont ainsi prises qui se trouvent à l’opposé de ce qu’il conviendrait de faire.
Cette diminution des effectifs et les fermetures déjà réalisées – et celles semble-t-il programmées – des antennes de police, conduit à ce que les agents ne soient plus installés dans les quartiers. Les policiers – et beaucoup d’entre eux le regrettent – travaillent, de plus en plus, dans une logique d’intervention au « coup par coup » qui, outre les dangers opérationnels qu’elle induit, finit de distendre les liens avec la population.
C’est une tendance très dommageable car jamais rien ne remplacera une présence humaine sur le terrain. A ce titre, si une majorité d’élus a adopté, ici même, le plan de vidéoprotection, ceux-ci ont tenu, dans un même mouvement, à insister pour que la mise en place de cette technologie ne serve pas de prétexte à une réduction de la présence policière, bien au contraire. La vidéoprotection est un instrument connexe au service d’une politique de sûreté. Elle ne saurait être le levier principal de cette politique.
D’autre part, les dispositifs tels que les équipes de correspondants de nuit mis en place par la Ville de Paris ou encore les clubs de prévention ne doivent pas être pensés en substitution d’une présence policière mais bien de manière complémentaire.
Enfin, suite aux préconisations issues des Etats Généraux de la nuit, il est bon de rappeler qu’en matière de tranquillité publique, la Mairie de Paris et les Mairies d’arrondissement entendent jouer tout leur rôle, mais uniquement leur rôle. La question de la dérégulation de l’espace public aux abords des établissements de nuit est un enjeu majeur pour la tranquillité des habitants ; elle réclame une réponse coordonnée et efficace de tous les acteurs, au premier rang desquels se trouve la Préfecture de Police.
Comment également, en matière de dérégulation de l’espace public, ne pas évoquer ce phénomène préoccupant, à plus d’un titre, ne serait-ce que pour la santé publique, de la consommation, et notamment par les plus jeunes, d’alcool dans la rue. Un phénomène qui m’a conduit, fin 2008, à vous demander, Monsieur le Préfet de Police, avec la Commissaire du 11e d’alors, d’étendre très largement, à trois secteurs de l’arrondissement, le périmètre d’application de l’arrêté préfectoral interdisant la vente et encore plus la consommation d’alcool, entre 16h et 7h, seul ou en groupe, sur la voie publique. Un arrêté toutefois difficile à mettre en œuvre et j’ai d’ailleurs, il y a quelques mois, attiré votre attention à ce sujet, Monsieur le Préfet de Police. En effet, toute interpellation pour ébriété manifeste sur la voie publique implique une procédure lourde, avant mise en cellule de dégrisement, réclamant l’obtention, auprès des services hospitaliers, d’un « bon de non admission ». Une procédure qui, de fait, peut immobiliser des fonctionnaires de police pendant plusieurs heures.
J’évoquais à l’instant le cas de Belleville. Je souhaite, pour conclure mon propos, y revenir à nouveau car, une fois de plus, il est l’illustration du moindre niveau de service public offert aux Parisiennes et aux Parisiens du fait de la baisse des effectifs policiers.
Depuis le mois de septembre, nous assistons, en effet, à la résurgence d’un marché sauvage sur le boulevard de Belleville et dans le haut de la rue du Faubourg du Temple. Ce phénomène qui est localisé sur les arrondissements du Nord et de l’Est de la capitale s’exprime d’une manière particulièrement aigue dans le quartier de Belleville. Au cœur d’un espace public très fréquenté, des vendeurs à la sauvette – dont la majorité se trouve dans une grande précarité – s’installent pour vendre des biens de toute nature générant ainsi des nuisances importantes pour les riverains. En septembre 2009, un dispositif dissuasif, je dis bien dissuasif, et efficace, salué, à ce titre, par la population, avait été mis en place par la Préfecture de Police, en lien avec les services de la Propreté de la Ville et de la Direction de la Prévention et de la Protection.
Or, depuis l’été dernier, par manque d’effectifs semble-t-il, une présence policière en continu n’est pas possible. Pourtant, elle seule permettrait d’apporter une solution pérenne à cette occupation illégale de l’espace public, sous réserve bien sûr que la dimension sociale et humaine du problème soit prise en charge par d’autres dispositifs et par d’autres formes d’action. Reste que sans l’intervention de la Préfecture de Police, seule compétente dans le maintien de l’ordre public, rien ne sera possible.
En matière de sécurité, et peut-être plus que dans tout autre domaine, les contraintes en termes de moyens humains et matériels sont difficilement acceptées par la population. Les Parisiens veulent une ville où ils se sentent en sécurité et où peut prospérer un modèle du vivre ensemble. Aux gardiens de la Paix, on apprenait, à une autre époque, qu’il fallait « ni trop défendre, ni trop permettre, mais toujours veiller ». Cette vigilance de chaque instant ne peut se faire sans des moyens humains et matériels pour lesquels nous entendons restés mobilisés.
Tel est le message de notre groupe que je souhaitais délivrer au moment de l’examen annuel du budget spécial de la Préfecture de Police, sans oublier, à la demande expresse de Pascal CHERKI, le commissariat du 14e arrondissement