Indépendance de l’audiovisuel public – texte issu de CMP

 

J’ai déjà eu l’occasion de rappeler, lors de la première lecture de ce texte, ô combien il était nécessaire de revenir sur la malheureuse loi de 2009 tant elle allait à l’encontre de toute l’évolution de notre législation qui conduisait jusqu’alors à garantir toujours plus de pluralisme et à permettre aux médias, notamment aux chaînes publiques, de disposer de l’indépendance nécessaire dans une démocratie.

 

C’est pourquoi je me réjouis aujourd’hui que nous soyons amenés à redonner au Conseil supérieur de l’audiovisuel le pouvoir qu’il n’aurait jamais dû perdre, ce pouvoir de désignation des trois présidents de l’audiovisuel public. Il était important de le faire.

 

Mais, je tiens à nouveau à le dire ici, il est une indépendance qu’aucune loi, malheureusement, ne saura rétablir, aucune loi ne permettra de redonner à l’audiovisuel public, en particulier à France Télévisions, l’indépendance budgétaire, l’indépendance financière qui était la sienne jusqu’au vote de la loi de 2009. Car rappelons, pour en mesurer toutes les conséquences aujourd’hui, que jusqu’alors, France Télévisions n’était financée que par la redevance, pour une part essentielle, et par 800 millions d’euros de recettes publicitaires.

Le coup politique du Président Sarkozy en 2008 aura eu pour effet de rayer d’un trait 450 millions d’euros de recettes publicitaires, décision dont le groupe dans un contexte d’un marché publicitaire à la baisse a bien du mal à se relever. La situation du groupe France Télévisions est une réelle préoccupation pour les membres de la commission que je préside et le gouvernement s’y attelle mais je tenais à en rappeler sa genèse. C’est la raison pour laquelle le maintien de la publicité en journée sur les chaînes de France Télévisions que nous allons adopter est essentielle pour donner au groupe une nécessaire visibilité sur l’avenir.

 

L’objectif initial de la loi était de tenir l’engagement n51 du candidat François Hollande, devenu Président de la République. Il sera naturellement atteint après le vote de cette loi et ce n’est pas mineur.

Mais le texte issu de la CMP dont nous débattons aujourd’hui, en fin de processus législatif, va bien au-delà. Nous avons en effet abouti à un texte se saisissant et répondant à une question essentielle, celle de savoir quels sont les moyens  que nous souhaitons donner au régulateur de l’audiovisuel du XXIe siècle. Car, grâce à cette loi, le CSA, devenu autorité indépendante, va non seulement être renouvelé dans sa composition même par la modification du nombre de ses membres et de leur mode de nomination, mais va, de surcroit, être doté des moyens de jouer un rôle essentiel de régulation économique, droit qu’il n’avait pas ou n’exerçait pas jusqu’à présent.

 

Or, pour garantir le pluralisme et lutter contre la concentration qui est la tendance naturelle du paysage audiovisuel français, à l’heure de la télévision connectée et alors qu’il faut relever les nombreux défis de la révolution numérique, il fallait armer le CSA, afin qu’il puisse jouer pleinement ce rôle.
C’est dans cet esprit que les travaux de la Commission Mixte Paritaire que j’ai présidé se sont déroulés. Nous sommes ainsi parvenus à un texte dont la cohérence est réelle en préservant au mieux les apports de chaque chambre tout en poursuivant l’objectif initial qui aura été notre fil rouge tout au long de l’examen de ce texte au Parlement : garantir de l’indépendance tant à l’audiovisuel public qu’au régulateur de l’audiovisuel.

 

C’est en ce sens que nous avons donné un rôle accru au CSA dans l’organisation du marché de la télévision numérique terrestre et ce, notamment, par la capacité qui lui est désormais donnée d’autoriser les changements de modèle économique des chaînes, et singulièrement le passage du payant au gratuit dans des conditions naturellement encadrées. La Commission Mixte Paritaire est, à cet égard, parvenue à une rédaction optimale. Le texte donne aussi des pouvoirs de conciliation au CSA entre les éditeurs de service et producteurs d’œuvres ou de programme audiovisuels ou leurs mandataires, ou les organisations professionnelles qui les représentent.

 

Corollaire d’une indépendance renforcée, le CSA sera désormais amené à rendre compte, dans son rapport annuel, des études ayant fondé ses décisions d’attribution de fréquences afin que soient mieux compris le sens de ses décisions et les arguments sur lesquels elles se sont fondées.

 

Il ne s’agit pas ici pour moi de décliner toutes les dispositions contenues dans ce texte , Marcel Rogemont, notre rapporteur s’en est fort opportunément chargé, mais de montrer, s’il le fallait, sa cohérence et son champ bien plus large que ce que certains annonçaient en la qualifiant improprement de « petite loi ».

 

Monsieur le ministre, nous nous réjouissons d’être parvenus au terme de cette belle élaboration législative en ayant un texte dont nous pouvons collectivement être fiers.