Protection des sportifs de haut niveau
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui revêt, comme cela vient d’être dit à l’instant, une importance capitale pour les 6 500 athlètes de haut niveau et les quelque 10 000 joueurs et entraîneurs professionnels qui font aujourd’hui vivre le monde sportif.
Dans le sport de haut niveau, d’abord, cette proposition de loi vise à remédier à la précarité matérielle et sociale dans laquelle de trop nombreux athlètes sont aujourd’hui placés. Tous ne sont pas médaillés d’or ; tous n’exercent pas leurs talents dans des disciplines qui attirent les sponsors ; tous ne bénéficient pas d’une couverture médiatique suffisante pour générer des revenus à partir de leur image. Pour nombre d’entre eux, la situation peut être difficilement soutenable au plan matériel, et certains sportifs vivent même sous le seuil de pauvreté. Nous avons tant d’occasions de rappeler, au sein de cet hémicycle, que l’égalité est au cœur du pacte républicain : c’est cette égalité entre tous les sportifs de haut niveau que nous voulons promouvoir ce soir.
Au regard des sacrifices personnels et professionnels que ces sportifs consentent pour porter haut les couleurs de la France, cet état de fait n’était plus acceptable. C’est donc pour pallier cette injustice que la proposition de loi adapte, par exemple, les conventions d’insertion professionnelle ; qu’elle confère aux fédérations sportives des obligations nouvelles en matière d’accompagnement, de formation et de suivi socioprofessionnel ; qu’elle crée les conditions de la mise en œuvre réelle du double projet, sportif et professionnel.
Mais la proposition de loi qui nous est soumise ce soir entend également, au plan social, rétablir une certaine égalité des droits entre les sportifs de haut niveau et les autres citoyens. En effet, ces sportifs n’étant généralement ni salariés, ni travailleurs indépendants, ils ne bénéficient pas de la couverture des accidents du travail et des maladies professionnelles offerte à toutes et à tous par le code de la Sécurité sociale, en vertu de ce que l’on appelle habituellement la solidarité nationale.
Or, non seulement ces sportifs sont plus exposés que d’autres à ce type d’accidents, du fait de leur activité physique intense, mais de tels accidents peuvent en outre se révéler fatals pour leur carrière. De la même façon, les sportifs de haut niveau peuvent souffrir, une fois leur carrière achevée, de pathologies liées à leur pratique sportive. C’est pourquoi la proposition de loi, dans son article 7, étend aux sportifs de haut niveau le bénéfice de la couverture sociale des accidents du travail et des maladies professionnelles. Je remercie du reste le Gouvernement d’avoir bien voulu lever en commission le gage qui figurait à cet article, afin que cette disposition puisse être votée.
Pour autant, la proposition de loi n’oublie pas le sport professionnel, qui connaît un certain nombre de problèmes juridiques qu’il était nécessaire de régler. C’est notamment le cas, comme vous le savez, de la fin annoncée du contrat à durée déterminée d’usage, qui a cours dans le monde du sport professionnel. Certains pourraient juger paradoxal que, en votant jeudi dernier l’article 20 du projet de loi sur le dialogue social, qui a enfin inscrit dans la loi de la République le régime spécifique d’assurance chômage des intermittents du spectacle, nous ayons renforcé le contrat à durée déterminée d’usage pour les intermittents du spectacle. Si nous l’avons fait, c’est parce que ce CDDU est adapté aux réalités du travail artistique.
Mais il n’en est pas de même dans le monde du sport, bien au contraire, et une évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation, dont certains nuancent parfois la portée – mais c’est un autre débat – a conduit à ce que nous proposions, à travers ce texte, la création d’un contrat de travail spécifique au monde du sport, protégeant à la fois les sportifs et l’équité des compétitions. C’est précisément pour garantir cette protection que nous avons précisé, à l’article 9, que ce contrat doit nécessairement être à durée déterminée. Certains pourraient objecter qu’il n’existe pas de contrat plus protecteur, dans le code du travail, que le contrat à durée indéterminée. C’est précisément notre travail de législateur que d’aller au-delà de ce paradoxe apparent. Ceux qui connaissent le monde du sport ne peuvent pas s’offusquer de notre choix, ni prétendre que nous allons précariser ces salariés.
Le sport professionnel ne saurait s’accommoder d’un autre type de contrat. En effet, un retour au contrat à durée indéterminée – dont la nature protectrice n’est pas remise en question dans le monde du travail classique – n’est pas concevable dans le monde sportif, tant il précariserait les sportifs, en permettant à leurs employeurs de mettre fin à leur contrat en cas de mauvaises performances. Le CDI serait un mauvais cadeau fait aux sportifs, car il porterait également atteinte à l’équité des compétitions, en permettant aux sportifs d’aller jouer, du jour au lendemain, dans l’équipe adverse. Vous l’aurez compris, le contrat à durée déterminée est la forme la plus adaptée de contrat de travail dans un secteur marqué par la compétition et l’aléa sportif.
Ce texte reconnaît également le rôle primordial joué par le Comité paralympique et sportif français et comporte bien d’autres dispositions sur lesquelles nous aurons l’occasion de revenir au cours de notre discussion. Mais je tiens à rappeler ici l’esprit de consensus – vous l’avez également souligné, monsieur le secrétaire d’État – qui a animé notre commission et qui démontre, s’il en est besoin, que ce texte est véritablement porteur de progrès pour les sportifs de haut niveau, comme les sportifs professionnels. Ce consensus a été obtenu grâce à l’investissement personnel, la qualité d’écoute et le travaux.
Vous avez, madame la rapporteure, fait référence à une tribune, dans laquelle de nombreux sportifs qui attendaient que nous légiférions sur cette question remercient la représentation nationale d’avoir pensé à eux. Qu’il me soit permis de leur retourner le compliment, de le leur dire que nous leur devons tant et que nous sommes particulièrement heureux, sur tous les bancs de l’Assemblée nationale, de leur témoigner enfin la reconnaissance de la nation