Conseil de Paris – Mise aux normes et maintenance du parc d’ascenseurs des bailleurs sociaux
Monsieur le Maire,
Mes chers collègues,
L’urgence de la sécurisation des ascenseurs vient de nous être rappelée de manière dramatique. Le 11e a en effet été frappé par deux fois, en moins d’un mois. Le 27octobre, dans un immeuble de logements sociaux gérés par Paris Habitat, la chute d’une cabine d’ascenseur a grièvement blessé une mère de famille et ses deux enfants. Le 24 novembre, un nouvel accident, plus tragique encore, se produisait, cette fois dans une résidence sociale gérée par l’Armée du Salut. Un ouvrier qui travaillait sur la réparation d’un ascenseur est décédé et trois de ses collègues ont été blessés.
Face à de tels événements, il n’est pas possible de rester immobiles et, après l’urgence de l’instant, vient nécessairement l’urgence d’une action.
Cette action doit ainsi à la fois porter sur la réparation, l’entretien et la maintenance des ascenseurs. Cette question n’est pas nouvelle et le rapport final rendu, en juin 2010, par la Mission d’Information et d’Evaluation nous avait déjà alertés cependant qu’il avait préconisé des voies d’amélioration.
Les dysfonctionnements des ascenseurs ont des répercussions immédiates et souvent contraignantes voire douloureuses sur la vie des habitants. Les événements dramatiques que je viens de rappeler m’ont ainsi amené à multiplier les rencontres avec les collectifs d’habitants vivant dans le parc social. Difficile, à l’issue d’une écoute approfondie, de nier la situation de malaise général que l’on trouve, parmi les résidents, concernant leurs ascenseurs. Sont notamment cités les pannes à répétition, les temps d’intervention aléatoires et des durées d’immobilisation trop longues.
Difficile cependant de nier les efforts d’investissements très importants qui ont été assumés par l’ensemble des bailleurs sociaux afin de répondre aux impératifs de sécurisation fixés par la loi Urbanisme et Habitat. Aujourd’hui, la totalité des ascenseurs sont en conformité pour ce qui est de l’installation de 9 dispositifs de sécurité sur le total des 17 qui, à terme, devront être installés. Le problème n’est donc pas à chercher dans le montant des investissements. Dans ce domaine, les bailleurs ont fait face à leurs obligations.
En revanche, le niveau de prestation offert aux résidents du parc social en matière des pannes est insatisfaisant. Dans ce domaine, toute démarche de progrès doit s’appuyer sur une approche quantitative rigoureuse. A ce titre, il convient de souligner l’importance de la généralisation du dispositif des « boites noires » qui, au travers d’enregistrements, permet le suivi des pannes. L’objectif fixé par la Mission d’Information et d’Evaluation de 4 pannes par an et par ascenseur apparaît souhaitable afin d’améliorer de manière notable les conditions de vie des résidents et notamment des plus âgés.
Ce que montre ce nombre de pannes c’est, de toute évidence, l’insuffisance de la maintenance préventive et corrective. Dans ce domaine, une responsabilité doit être établie : celle des ascensoristes. Ces entreprises, comme toute entreprise prestataire, sont tenues à des obligations. Quand celles-ci ne sont pas respectées, il est normal de le souligner de la manière la plus appuyée qui soit; c’est là un principe de bonne gestion. C’est également un principe moral, quand il est question de la sécurité des personnes. Car c’est bien plus du défaut d’entretien et du manque de maintenance que de son ancienneté que vient la dangerosité d’un ascenseur.
Les entreprises ascensoristes, dont le marché a toutes les caractéristiques de l’oligopole, n’ont pas respecté la règle qui aurait voulu qu’elles réalisent les efforts de formation et de recrutement nécessaires. Au contraire, profitant de l’effet d’aubaine qu’a représenté la loi de 2003, elles se sont concentrées sur les mises aux normes, souvent en y affectant les meilleurs techniciens, plutôt que sur la maintenance et l’entretien. Elles ont ainsi préféré accroître le rendement des personnels, en augmentant pour cela le nombre d’ascenseurs suivis par un même technicien. Alors que, dans les années 90, un technicien s’occupait en moyenne de 50 à 80 ascenseurs, ce chiffre a augmenté fortement peut atteindre jusqu’à 150, avec une dégradation inévitable du niveau de maintenance aussi bien corrective que préventive. Et l’équation est simple : moins de maintenance, c’est moins de sécurité !
Face à cette situation, il est essentiel que les bailleurs sociaux fassent évoluer leur organisation afin de mieux contrôler les prestations des ascensoristes et qu’ainsi, en pointant les carences, ils leur imposent des politiques de ressources humaines adaptées se traduisant alors par des recrutements et un effort soutenu de formation. Pour cela, il convient notamment de renforcer et de systématiser les mécanismes de pénalités afin de contraindre les entreprises prestataires et les amener à remplir leurs obligations contractuelles.
Les pannes et les immobilisations sont des éléments qui viennent altérer profondément la vie des résidents. C’est pourquoi, il est essentiel de généraliser et d’harmoniser entre les bailleurs, tout particulièrement les bailleurs dépendant de la Ville de Paris, les dispositifs d’assistance aux locataires et d’indemnisations éventuelles.
Meilleur suivi, pénalités, assistance et indemnisation, tels sont les conditions garantissant qu’un service de qualité soit dispensé, de la même manière, sur l’ensemble du territoire parisien. Cette exigence d’égalité est aussi une exigence absolue de sécurité.